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Pourquoi les enfants requièrent une invitationà entrer en relation plutôt que de l’attention?

Updated: Sep 23, 2021

Écrit par Deborah MacNamara (16 mai 2018)

Traduit par Nathalie Malo


Un parent m’a demandé : « Est-ce que vous croyez que je devrais accorder plus d’attention à mon enfant? » À vrai dire, sa fille était anxieuse, impatiente, facilement frustrée et sujette à la résistance. À la lumière de ce qui précède, cette mère était préoccupée par le questionnement suivant : « Est-ce possible qu’un manque d’attention à l’égard de ma fille soit à la source des comportements problématiques qu’elle exhibe? »


Toutefois, cette mère savait pertinemment qu’elle devait prendre l’initiative pour trouver une solution viable qui lui permettrait de sortir de l’impasse dans laquelle elle s’était enlisée avec son enfant. Ainsi, je lui ai recommandé de privilégier un autre questionnement qui serait plus approprié et qui lui donnerait un aperçu plus juste de la situation qu’elle vit avec sa fille. Au lieu de se canaliser sur l’attention que cette femme dédiait à son enfant, je me demandais si cette fillette était ouverte à entretenir une relation avec sa mère. Or, si ce n’est pas le cas, comment serait-il possible de susciter ou de solidifier une relation entre les deux parties?


Cette mère bienveillante et responsable a continuellement fait en sorte que son enfant reçoive toute l’attention imaginable, notamment en intervenant lorsqu’elle adoptait un comportement inadéquat, en veillant à ce que ses devoirs soient faits et en s’assurant qu’elle soit à l’extérieur de la maison à tous les matins. De plus, cette maman consacrait énormément de temps à s’engager dans des affrontements avec sa fille, à gérer le bouleversement et la colère de ses autres enfants ainsi qu’à découvrir des moyens pour passer du « temps de qualité » avec l’enfant concerné. Pour ces motifs, il est évident que le degré d’attention prodigué par cette femme n’était pas la source du problème.


Accorder de l’attention aux enfants

Il s’avère que l’attention ne correspond pas à un endroit qui nous fait progresser et qui encourage notre développement. En effet, elle est transitoire et éphémère, et elle reflète une solution rapide qui s’amoindrit dès que vous n’êtes plus une priorité. Nos enfants requièrent quelque chose de plus nourrissant qui puisse persister jusqu’à l’âge adulte. Dans cette optique, ils ont besoin d’une invitation à entrer en relation qui les fera danser jusqu’au point d’arrêt.


Les êtres humains naissent avec un instinct inné qui est afférent à la recherche de contact et de proximité avec autrui. Le défunt neuroscientifique Jaak Pankseep l’avait nommé « instinct de quête » et il avait mentionné que ce dernier figurait systématiquement auprès de toutes les espèces de mammifères. L’instinct de quête se dissimule derrière le désir de proximité d’un enfant et il le pousse à vouloir s’accrocher à nous. Le besoin profond d’affiliation des enfants ne constitue pas une erreur, car il fait partie du plan de la nature qui consiste à les garder près d’elle pour en prendre soin. Le vieux dicton selon lequel un enfant est toujours en quête d’attention n’explique pas cette faim instinctive de connexion.


Il est normal pour un enfant de réclamer de l’attention d’une multitude de façons, que ce soit en s’accrochant physiquement à nous, en revendiquant émotionnellement notre attention par le biais d’éruptions, ou simplement en nous annonçant : « Je veux du temps seul avec maman ». Néanmoins, la problématique ne se situe pas au niveau de la soif de connexion de l’enfant, mais plutôt quant à la manière dont celle-ci est satisfaite. Le fait de donner à un enfant tout ce qu’il demande et de répondre uniquement à ses exigences ne lui permet pas de se reposer sous nos soins. À vrai dire, cela peut le rendre davantage impatient et exigeant. Somme toute, les enfants ne sont pas censés être en charge d’exiger notre attention, mais préférablement de la tenir pour acquise.


Les débats qui opposent la qualité à la quantité de temps attribué aux enfants ratent leur objectif initial et ils nous piègent dans des discussions à propos du temps passé avec un enfant, au lieu de miser sur l’invitation à entrer en relation qui lui est destinée. Il importe de souligner que les relations ne peuvent pas être décomposées en unités de temps et de secondes. En réalité, ces unités de mesure omettent de faire part de notre désir d'être avec un enfant, du sentiment de chaleur que procure le fait d'être ensemble, et du véritable plaisir que nous procurent les moments que nous partageons avec lui.


Si le temps que nous accordons à un enfant ressemble plus à un compte à rebours ou au passage d’un événement à un autre, alors ce temps devient une unité de mesure, et il ne coïncide plus avec les émotions qui se trouvent entre nous. À ce titre, nous devons nous poser les questions suivantes :

  • Souhaitons-nous le comprendre, être à l’affût de ses réactions émotionnelles et de voir le monde à travers de son regard?

  • Devons-nous nous efforcer de répondre simplement à ses requêtes et au contraire, prendre l’initiative de nous occuper de lui?

  • Est-ce que nous calculons les heures que nous partageons avec un enfant ou est-ce que nous envisageons une question plus subtile, à savoir si notre enfant compte sur nous?


L’invitation à entrer en relation

Nous ne pouvons pas soustraire nos enfants de leur soif de relations en nous contentant simplement de répondre à leurs tentatives dans le but d’attirer notre attention. Nous devons prendre l’initiative de leur fournir des soins, de leur offrir davantage que ce qui est sollicité et d’assumer la responsabilité de combler leur soif de connexions. Dans cette perspective, si des enfants doivent se démener pour susciter notre attention, alors ils ne sont pas en mesure de s’y reposer, et à cet effet, ils peuvent devenir prisonniers de la performance qui est nécessaire pour l’obtenir.


Au moment où la mère, que nous avons mentionnée précédemment, a commencé à comprendre que la solution ne consistait pas à accorder de l’attention à sa fille, elle a opté pour une autre alternative, soit celle de présenter à celle-ci une invitation en faveur d’une démarche qui est extrêmement plus profonde et significative. Par conséquent, elle a transmis à son enfant une invitation généreuse à se reposer sous ses soins de même que de se libérer de la faim la plus considérable que le cœur humain connaisse. Entre autres, il s’agissait d’une invitation à entrer en relation pour laquelle sa fille n’avait pas à travailler pour, et pour laquelle il ne lui était pas demandé d’être suffisamment adéquate pour la garder. En outre, c’était une invitation à être entendue, à être vue sous un angle vulnérable, à avoir de l’importance, à être soutenue fermement et à dévoiler ses secrets.


Par ailleurs, l’invitation à entrer en relation de cette mère a été caractérisée par la présence de limites, de restrictions et de la possibilité de dire non aux demandes de sa fille. La générosité de cette femme déteignait sur les émotions de son enfant, que ce soit pour sa frustration, sa résistance et son mécontentement, et ce sans pour autant qu’elles aient été corrigées ou modifiées. De plus, cette mère a laissé de la place à sa fille afin qu’elle soit en mesure d’exprimer ses sentiments relatifs à des choses et à des circonstances qui n’ont pas données les résultats escomptés et ce, tout en lui communiquant des directives afférentes au comportement à privilégier ainsi qu’à la manière de traiter autrui. Tandis que cette mère se montrait de plus en plus apte à accueillir la colère de son enfant sans qu’elle ne soit engendrée, qu’elle soit davantage sereine face à la résistance de sa fille, et qu’elle soit en mesure de lui expliquer qu’aucun comportement ou émotion ne saurait détruire leur relation, alors sa fillette a ressenti un sentiment profond de ce que signifiait le fait d’être attachée.


En principe, les enfants ne requièrent pas seulement notre attention et ce, bien que cela puisse être un élément de la démarche que nous utilisons pour leur transmettre une invitation à entrer en relation. Ils nécessitent une invitation à la proximité pour se sentir, et ce même, s’ils n’ont pas répondu à nos attentes. Il est essentiel qu’ils réalisent que notre désir d’être en leur présence est indéfectible, généreux, inconditionnel, personnalisé, exclusif et protégé contre les attachements concurrents.


Où portons-nous notre attention?

La croissance d’un enfant est alimentée depuis un lieu de repos émotionnel, c’est-à-dire quand il peut considérer pour acquis qu’il ne doit pas travailler afin de recevoir une invitation pour établir une relation avec nous. Cependant, il nous est impossible de satisfaire à ses besoins si nous nous contentons exclusivement de répondre à ses attentes. Comme l’énonce si pertinemment Gordon Neufeld : « Lorsque nous devons travailler pour l’amour, nous ne pouvons pas nous y reposer. »


À vrai dire, il est nécessaire de lancer une invitation plus profonde à entrer en relation qui est issue de cet espace en nous qui aspire à être la réponse aux besoins d’un enfant. En d’autres termes, cela implique que nous devons nous efforcer d’être davantage bienveillants et indulgents quant à ce qu’un enfant refuse de faire. En outre, cela sous-entend que nous devrons faire preuve de générosité en invitant ses émotions au moment où nous contrecarrons ses plans et que nous prenons l’initiative de sa prise en charge. Ainsi, cela signifie que nous devrons lui expliquer que cette relation est permanente et qu’elle constitue le fondement sur lequel il peut se reposer.


La nature poussera nos enfants à jouer et à grandir quand nous nous efforcerons de leur procurer un repos relationnel. Pour cette raison, ils seront libérés de la soif la plus profonde qui réside en chacun de nous et à laquelle nous ne pouvons répondre qu’en nous reposant sur l’invitation d’autrui en lien avec la prise en charge. En dernier lieu, l’amour est censé être un cadeau qui est offert gratuitement par les personnes qui nous prodiguent des soins, et conséquemment, cela mérite que nous y prêtions une attention toute particulière.



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