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Comprendre la résistance des adolescents au moyen de la tempête de la contrevolonté

Updated: May 19, 2023

Par Darlene Denis-Friske (10 octobre 2019)

Traduit par Nathalie Malo


Dans le cadre de mon travail avec les parents d’adolescents, je me sens toujours enthousiaste à l’idée de leur faire découvrir le concept fondamental de la « contrevolonté » dans un contexte de développement sain et équilibré. En effet, une connaissance juste de cette notion peut faire toute la différence quand il s’agit de comprendre nos adolescents, et ce, plus particulièrement lorsque nous nous sentons déroutés ou inquiets quant à leur prédisposition à repousser. Il importe de mentionner que ce concept a été introduit au début du XXème siècle par le Dr Otto Rank, un psychanalyste viennois, et qu’il a été développé et approfondi par la suite par le Dr Gordon Neufeld. En termes simples, la contrevolonté correspond à notre réaction instinctive qui consiste à résister, à nous opposer, ou à repousser dès que nous sommes confrontés à un sentiment de contrainte ou de coercition qui dépasse nettement notre aptitude à le gérer, et qui de plus, est nettement supérieur à notre désir de coopérer ou de nous conformer. À vrai dire, l’instinct de contrevolonté ne se manifeste pas parce que nous cherchons à être compliqués ou que nous décidons de faire preuve d’un esprit de contrariété (bien qu’il soit possible que cela se produise), il constitue plutôt une réaction défensive innée dont le but est très précis en termes de protection et de développement.

La contrevolonté est généralement plus marquée et persistante au cours de l’adolescence (et lors de la petite enfance!), et si elle n’est pas prise en compte, elle peut entraîner des tensions considérables au sein de la relation parent-adolescent. Il importe de mentionner que le but de la contrevolonté est de favoriser l’avènement de la maturation. D’ailleurs, la contrevolonté à l’adolescence, permet de conduire le jeune vers le processus d’individuation en rejetant les pensées, les désirs, les exigences et la volonté d’autrui dans le but de faire de la place à sa propre façon de penser, à ses idées et à ses opinions. Or, par le biais de la contrevolonté, qui vise à écarter l’influence des autres, la Nature essaie de fournir un espace similaire à un cocon où l’adolescent peut être en mesure de développer son propre raisonnement. Il convient de noter que la contrevolonté existe pareillement, et peut-être même surtout, au cœur des relations avec les parents, les enseignants et les individus dont l’adolescent est intimement lié, et ce, puisque la Nature cherche à l’aider à se développer, indépendamment de ses parents et de ses pairs, au cœur d’un environnement qui est véritablement sain. Par ailleurs, la contrevolonté sert à engager la transition vers l’âge adulte, bien qu’elle soit en grande partie responsable des nombreux bouleversements inhérents à ce processus.

Alors, qu’est-ce que cela signifie concrètement? En règle générale, si nous disons « noir », l’adolescent répondra « blanc », et si nous disons « blanc », il répondra « noir ». Dans cette perspective, cette période peut être extrêmement déconcertante et exaspérante alors que soudainement nous prenons conscience que notre enfant semble dorénavant croire que nous sommes ignorants, « démodés » et que nos conseils de même que nos idées paraissent insignifiants à ses yeux. Il importe de souligner qu’en tant que parents, nous pouvons nous sentir exclus quand nous essayons de connecter avec lui, de le reprendre, de lui enseigner ou de l’éduquer. De fait, cette dynamique peut constituer une source de difficultés dans la relation que nous avons établie avec lui. Toutefois, si nous comprenons que la contrevolonté occupe un rôle significatif, alors il nous sera possible de braver cette tempête passagère avec aisance.


Il est important de préciser les facteurs qui peuvent exacerber cette « tempête de contrevolonté ». En outre, ce sont les circonstances où, par manque de compréhension, nous considérons le rejet de notre enfant personnellement, nous éprouvons nos propres sentiments douloureux de façon défensive, nous réagissons avec une force et une autorité accrues, nous exerçons davantage de pression et nous transmettons nos attentes en utilisant un langage qui est imprégné de coercition et d’ultimatums. Par conséquent, devinez ce qui se produira ensuite? Nous susciterons une intensification de la contrevolonté à un moment où l’adolescent est en train de nager dans celle-ci, et où il commence peut-être même à s’y noyer.

À ce propos, l’excellent article du Dre Deborah MacNamara, qui est paru sur le site Web de l’Institut Neufeld francophone, et qui s’intitule : « Le secret étonnant qui se dissimule derrière l’opposition et la résistance des enfants », l’auteure formule des recommandations qui consistent à encourager fortement les parents « … à anticiper la résistance et à ne pas prendre cette dernière à cœur. » De plus, Dre MacNamara nous rappelle que certaines pratiques peuvent atténuer l’intensité de la contrevolonté, telles que de privilégier la connexion lors de moments difficiles, de minimiser la coercition, de « prendre une pause » au cours d’un épisode de contrevolonté plutôt que de se précipiter, de faire de la place pour les idées et les pensées de l’adolescent, et à toujours s’excuser quand les situations ont dégénérées, et ce, de manière à ce que la relation demeure l’ultime priorité.

Somme toute, la contrevolonté rencontrée auprès de nos adolescents peut vraisemblablement nous entraîner sur une mauvaise pente, et c’est fréquemment le cas d’ailleurs… jusqu’à ce que nous la considérions dans un contexte de développement sain et que nous commencions à travailler avec elle de façon à lui accorder l’espace nécessaire pour s’acquitter de sa fonction développementale.



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