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Cultiver l’indépendance : un paradoxe!

Par Colleen Drobot (15 novembre 2010)



Dernièrement, j’ai lu une étude qui concluait que les nord-américains accordent une grande valeur à l’indépendance. Nous voulons tous que nos enfants grandissent et se tiennent solidement sur leurs deux jambes; qui veut qu’à trente ans, leur enfant habite encore avec eux? Le problème, comme l’explique Dr Neufeld, est que nous ne sommes pas des oiseaux qu’on peut pousser hors du nid. En fait, plus nous poussons nos enfants vers l’indépendance, plus ils se cramponnent, abandonnent ou se tournent vers quelqu’un d’autre pour obtenir de l’aide. Si nous voulons approfondir notre attachement et cultiver leur indépendance, il nous faut d’abord inviter nos enfants à dépendre de nous.


Paradoxalement, lorsque que nous transmettons à nos enfants le message que nous allons prendre soin d’eux, qu’ils peuvent compter sur nous, s’appuyer sur nous, cela leur permet de se détendre et de se sentir bien nourri (encadré, comblé, pris en charge). C’est alors qu’ils commencent à s’aventurer, à essayer des choses par eux-mêmes. Je le constate moi-même quand j’ai un problème comme, par exemple, avec mon ordinateur. Plus mon mari me refuse son aide, plus je me sens impuissante et je veux tout abandonner. Mais quand il s’approche et dit : « Viens, laisse-moi t’aider », je me sens reconnaissante et attachée à lui. Je m’apaise et retrouve ainsi mon énergie et ma confiance pour comprendre les choses par moi-même. Pour que les humains puissent se tenir debout, ils ont d’abord besoin de sentir qu’on prend bien soin d’eux.


J’ai travaillé pour un formidable directeur d’école qui connaissait ce secret. Il nous invitait généreusement à compter sur lui et il soutenait toujours les membres de son personnel. Les enseignants lui étaient attachés et il faisait ressortir le meilleur en chacun de nous. En fait, nous avons travaillé plus fort pour lui que pour n’importe quel autre directeur. Il était un chef d’équipe formidable de qui nous pouvions dépendre. Tous les bons films sur des enseignants illustrent d’ailleurs cette relation d’un professeur qui invite son élève à s’appuyer sur lui jusqu’à ce qu’il soit capable de s’envoler. Nous ne voyons jamais le professeur agir de façon mesquine, disant : « Ne viens pas me demander de l’aide, débrouille-toi! » Au contraire, ces professeurs nous invitent dans leur classe et nous assurent de leur disponibilité. Si nous avons du mal à accomplir une tâche, ils nous transmettent le message : « Je suis là pour toi quand tu en as besoin ».


Je vérifie la véracité de cette sagesse paradoxale auprès de mes propres enfants. Quand je dis à ma fille : « Tu as du mal avec cette chaussure, laisse-moi t’aider à la lacer », elle veut alors apprendre à lacer ses chaussures elle-même. Quand je dis à mon fils, qui travaille fort pour écrire : « Je vais t’aider, on va écrire une ligne chacun », non seulement est-il reconnaissant, il est d’accord pour essayer plutôt que de se décourager et abandonner. Ce n’est pas qu’un coup de main ne soit parfois moins approprié, ni que nous ne puissions jamais dire : « Non, je ne peux pas t’aider pour le moment. » Pas plus que nous ne devrions nous précipiter pour tout arranger à leur place ou les interrompre quand ils veulent faire quelque chose eux-mêmes. Mais globalement, être généreux dans notre volonté de prendre soin de nos enfants contribue grandement à les aider à murir et à grandir.


Notre confiance dans le processus de développement et dans le fait que nous sommes ce qu’il y a de mieux pour notre enfant les aidera à réaliser leur plein potentiel. Et un jour, si nous avons la chance de vivre longtemps, ils pourraient nous inviter à dépendre d’eux.

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